Niviaq Korneliussen

Niviaq Korneliussen, autrice queer et figure de la jeune génération d’auteurs groenlandais, possède une écriture et une précision narrative qui échappent à toutes les étiquettes. Son deuxième roman contient tout, mais ne ressemble à aucun autre. Une jeune Inuite quitte Nuuk, la capitale du Groenland où habitent sa famille et sa copine, pour aller étudier dans une université danoise. Dans une région où le suicide est une véritable épidémie, une fêlure s’immisce sournoisement en elle. Un étau se resserre autour de ce personnage unique, sensible, à l’humour décalé. Roman sous tension, habité par la blancheur magnétique de la neige et de la lumière, où même la noirceur de l’hiver y est aveuglante. Là réside l’intelligence de l’autrice : le récit brise le cœur autant qu’il captive, se tenant en parfait équilibre entre l’ombre et la lumière.

Homo sapienneest une plongée vertigineuse dans la vie de cinq jeunes Groenlandais. Le succès de ce roman aux quatre coins du globe tient sur le fait que l’auteure crée un univers vrai et humain avec divers personnages qui vivent des crises identitaires. Le texte est très protéiforme : de lettres, on passe à la narration classique et aux échanges texto. On s’interroge sur la liberté d’être soi et sur ses désirs les plus profonds. On témoigne de la découverte de l’homosexualité, des questionnements quant au genre et à l’adultère. C’est sur « l’île de la colère » que Fia, Ivik, Arnak, Inuk et Sara doivent défoncer les tabous existants puisqu’on sent, sur leurs jeunes épaules, tout le poids de leur génération. Une œuvre à la fois très intime et universelle dont on ne sort pas indemne.